"L'opticien ne doit plus être un bouc émissaire"
C'est le titre d'une tribune signée Jean-Pierre Champion, le directeur général de Krys Group, dans Les Échos de ce mercredi. Il y met en cause le vote au Sénat, fin juillet, de la loi Le Roux, selon lui potentiellement "destructrice de valeur et d'emplois pour la filière" visuelle.
Il y a deux jours, Jean-Pierre Champion a de nouveau livré son point de vue dans les colonnes du quotidien économique. Un point de vue qui se veut une nouvelle fois offensif. D'emblée le directeur général de Krys Group estime que l'adoption au Sénat, fin juillet, de la loi Le Roux sur les réseaux de soins "constitue un point d'orgue dans l'acharnement d'une partie de la majorité gouvernementale et parlementaire à l'encontre de la profession d'opticien". Il en veut pour preuve l'amendement ajouté à la proposition de loi par le sénateur socialiste Yves Daudigny, lequel reconnaît "le bien-fondé des réseaux de soins sans numerus clausus pour les professions de santé… à l'exception toutefois des opticiens à qui il réserve, et à eux seuls, les réseaux de soins dits 'fermés'". Aux yeux de M. Champion, pareil amendement est purement et simplement "une discrimination".
Le directeur général de Krys Group voit dans ce qu'il appelle une "offensive parlementaire" un prolongement des polémiques qui ont successivement portées sur les prix, le nombre de magasins d'optique en France et sur les marges. À ce propos, Jean-Pierre Champion tient à faire valoir ses arguments. Dire que les tarifs pratiqués en France sont les plus chers d'Europe est selon lui une contrevérité : "on sait que les prix pratiqués en France, dès lors que l'on compare les mêmes produits, sont identiques à ceux des autres pays européens". Revenant sur la question de la marge, il tient également à rappeler qu'il faut distinguer marges brute et nette : "si l'optique affiche des marges brutes qui peuvent rappeler en apparence l'industrie du luxe (60 %), elle dégage in fine un résultat net d'artisan commerçant (4 %). Entre le brut et le net, il y a transformation de la matière et délivrance d'un service : les verres sont en effet détourés, polis et montés en magasin, et l'opticien passe plus de 2 heures en moyenne pour chaque client", fait-il valoir.
"Instrumentaliser les réseaux de soins pour réduire le nombre d'opticiens traduit le désengagement de l'Etat à traiter une problématique de santé publique", poursuit par ailleurs M. Champion. À l'en croire, le législateur utiliserait les réseaux de soins pour faire pression sur la démographie des opticiens. Et le directeur général de Krys Group d'inviter vivement les pouvoirs publics à explorer d'autres pistes en vue d'assurer au mieux "l'accessibilité aux soins" visuels : "Si le législateur veut s'attaquer à l'accessibilité des soins, tant géographique qu'économique, il doit s'appuyer sur deux tendances de fond : l'augmentation du nombre de porteurs de lunettes (de 37 à 40 millions d'ici à 2020) et la baisse régulière du nombre d'ophtalmologistes (de 200 à 300 par an)", avance-t-il. Et de détailler le fond de sa pensée : "Le phénomène démographique doit permettre aux opticiens d'augmenter leur productivité et de la redistribuer sous forme de baisse des prix aux consommateurs. La désertification médicale doit être l'occasion de permettre aux opticiens de réaliser eux-mêmes les missions que les ophtalmologistes accepteront de leur déléguer. Au-delà des protocoles « ophtalmos-opticiens », ces derniers sont prêts à passer leur diplôme en trois ans plutôt qu'en deux afin de gagner encore en expertise".
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