Le volontarisme des opticiens ambulants
La santé libérale et publique est au bord de la crise de nerf, avec des professionnels enferrés dans des corporatismes irritants et embourbés à cause d’un État régalien improductif.
La santé libérale et publique est au bord de la crise de nerf, avec des professionnels enferrés dans des corporatismes irritants et embourbés à cause d’un État régalien improductif.Et par un effet de ricochet, les patients sont pris en otages quand ils ne sont pas tout simplement égarés dans des déserts médicaux. Ces clichés tenaces ne doivent pas faire de l’ombre à des initiatives qui remettent les professionnels dans l’action et dans leur fonction.
Des débats récurrents dénoncent le nombre conséquent de magasins d’optique en France installés à tous les coins de rues, avec pour corollaire une marchandisation jugée abusive des équipements visuels. Pourtant, des opticiens s’engagent à inverser le schéma en effaçant le magasin pour se déplacer chez les patients. Il ne s’agit pas d’une pirouette, mais d’un enjeu d’accès aux soins visuels pour tous. En effet, beaucoup de personnes, notamment les plus âgées, renoncent aux soins optiques pour diverses raisons : négligence, éloignement géographique, perte d’autonomie, ophtalmologistes inaccessibles…
Dans l’objectif de faire de la prévention et de s’intégrer au plus près du parcours de soin des patients, trois enseignes de l’optique en mobilité — Les Opticiens Mobiles, Les Opticiens à Domicile, et L’Opticien qui Bouge — ont créé un collectif, le Regroupement des Opticiens À Domicile (ROAD), pour démontrer que les opticiens ambulants « par leur nombre et par leur disponibilité » sont « en mesure de répondre à la problématique territoriale de la désertification médicale dans l’optique. » Et en changeant le regard sur l’opticien marchand qui est aussi un professionnel paramédical engagé.
Le collectif ROAD entend aller plus loin en affirmant que « le déploiement massif du métier d’opticien de santé en mobilité permettrait à la France de réaliser une économie de 30 milliards d’euros par an qui sont perdus, en coûts cachés et en perte de productivité, à cause d’un mauvais accès aux soins visuels », selon une étude de l’Institut Sapiens commanditée par le collectif. Un chiffre ahurissant qui met en lumière la gabegie d’un secteur de la santé à la dérive dont la prévention est le parent pauvre. Un rapport de la Cour des comptes paru en 2021, le rappelle de manière récurrente : « En mesurant l’impact des politiques de prévention menées en France, la Cour a pu constater que les résultats obtenus sont globalement médiocres, et ce, malgré un effort financier comparable à celui des pays voisins. » En cause, les corporatismes irritants et un État improductif… Le volontarisme des opticiens ambulants saura-t-il améliorer un système de santé épuisé par une fuite en avant sans réelles avancées réformistes ?
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