Alors que le décompte des opticiens ciblés par les violences urbaines se poursuit, des mesures d’aide ont été annoncées par le ministère de l’Économie. De son côté, le secteur se mobilise, du terrain aux plus hautes instances, pour accompagner les opticiens les plus touchés. 

Selon le Ministère de l’Économie, quelque 700 commerces au minimum, tous domaines confondus, ont été plus ou moins sévèrement frappés par les émeutes qui secouent la France depuis la semaine dernière. Buralistes, banques, surfaces alimentaires, enseignes de mode et de sport sont visiblement les plus touchés. Pour le secteur de l’optique, le décompte est toujours en cours, mais un chiffre circule, celui d’une centaine de points de vente au moins concernés à travers tout le territoire. Certains opticiens, on l’a dit dès vendredi, ont été durement touchés - incendies, pillages, saccages -, les laissant sous le choc. Mais beaucoup d’autres, moins traumatisés, ont aussi fait l’objet de dégradations relevant surtout de dégâts collatéraux (typiquement, les vitrines étoilées), suite aux affrontements violents entre émeutiers et forces de l’ordre. Ces boutiques-là sont certes détériorées mais pas fermées. Bref, si le chiffre d’une centaine de magasins au total venait à être confirmé dans les heures ou les jours qui viennent, cela ferait alors du commerce d’optique l’un des secteurs d’activité les plus durement « tapés », pour le dire trivialement. « On a été une cible privilégiée, c’est sûr », nous ont souvent dit, depuis la semaine dernière, nos différents interlocuteurs.

Quelles réponses les pouvoirs publics apportent-ils dans ce contexte ? Samedi, lors d’un point presse de Bruno Le Maire secondé par Olivia Grégoire, la ministre déléguée des PME et du commerce, il a été annoncé plusieurs choses. Le ministre a demandé aux assureurs de prolonger les délais de déclaration de sinistre, de réduire les franchises, de faciliter le traitement des procédures et d’indemniser au plus vite les professionnels dont l’activité est totalement paralysée. Le report de paiement des charges sociales ou fiscales a également été annoncé par Bercy. Le ministère a aussi appelé les banques à faire preuve « de la plus grande compréhension en termes de traitement des échéances ». Nécessaires, ces aides, mais pas suffisantes, estiment certains au regard de l’étendue des dégâts dans certaines boutiques sérieusement endommagées voire dévastées. « Le temps que les assureurs lancent les indemnisations, pour certains il faudra des jours et des jours, peut-être des semaines, avant de retrouver un fonctionnement plus ou moins normal. Quand il y en a pour plusieurs dizaines de milliers d’euros de préjudice, on ne relance pas la machine comme ça, du jour au lendemain », se désole une source syndicale, rappelant que bien des opticiens ne disposent pas de la trésorerie pour sortir la tête de l'eau dans une telle situation. D’autant plus que la crise sanitaire en a fragilisé beaucoup, qui épongent encore les prêts garantis par l’État…

Justement, pour livrer des clients en attente de leurs équipements, des initiatives du type système D pourraient-elles voir le jour comme au temps de la crise sanitaire ? Certains semblent y penser, notamment avec l'aide de confrères ayant été épargnés par les événements. Certains opticiens préservés par les émeutes pourraient ainsi mettre en place, pour leurs collègues à l’arrêt faute de locaux, des créneaux horaires façon permanences ; dans l'immédiat, cela permettrait aux clients de récupérer leurs lunettes… Des mobilisations locales, zone de chalandise par zone de chalandise, semblent vouloir prendre forme, balbutiantes pour le moment car le traumatisme généré laisse certains professionnels encore sonnés. Au niveau des enseignes et centrales aussi, évidemment, des initiatives s’organisent pour, dans l’urgence et selon l’ampleur des dégâts, porter assistance aux opticiens victimes des événements. À notre connaissance, certaines structures ont même mis en place ce week-end des cellules de crise, ne serait-ce que pour dénombrer leurs adhérents concernés et évaluer la nature des préjudices subis. Les syndicats d'opticiens, eux, porteront la voix des commerçants victimes auprès des pouvoirs publics lors une réunion que l'on nous dit prochaine. « Toutes celles et ceux qui aujourd’hui ne peuvent plus travailler doivent pouvoir compter sur la réactivité de la filière », nous glisse un décideur qui croit savoir que les organisations professionnelles, probablement via le Conseil Interprofessionnel de l'Optique, planchent en ce moment même sur la question. « En pleine saison solaire, des solutions sont à trouver rapidement, par exemple, pour faciliter le réapprovisionnement des magasins qui ont été dévalisés », nous confie un autre haut responsable, bien conscient que si la profession fait souvent preuve de résilience psychologique, un redémarrage ne peut se faire qu’avec des aides concrètes.

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