Après s'être intéressés aux protéines de soja et d'amidon, les scientifiques regardent maintenant du côté des poulaillers et des propriétés mécaniques d'une matière issue des plumes de poulet.

C'est une plaisanterie ? Pas du tout. Fin mars, lors du 241ème congrès de la Société Américaine de Chimie, des chercheurs de l'Université du Nebraska ont présenté un composite de plastique contenant 50 % de plumes de poulet. Drôle d'idée, penseront certains. Pas tant que ça en fait. Le poulet étant la viande la plus consommée dans le monde, cela génère plusieurs millions de tonnes de déchets par an. Pour valoriser cette matière perdue que sont les plumes, les chercheurs ont mis au point ce qu'on appelle un thermoplastique, autrement dit un matériau qui, une fois chauffé, est malléable à volonté. D'où les possibilités infinies de modelage qu'offre ce nouveau composite dans divers domaines. Professeur associé à cette recherche, Yiqi Yang détaille : "Utiliser des déchets comme source alternative de matériau est l'une des meilleures approches pour tendre vers une société plus durable et plus responsable d'un point de vue environnemental". De fait, l'utilisation des plumes de poulet pourrait être l'une des solutions de rechange aux plastiques fabriqués à partir d'hydrocarbures, donc moins propres. Un usage en lunetterie de ce composite à base de plumes, est-ce envisageable ? Nous avons posé la question à Thibaut Bressin, en poste à Alutec, un laboratoire qui est à l'affût des potentialités des nouveaux matériaux exploitables en lunetterie : "A priori, c'est tout à fait sérieux et crédible. Les plumes de poulet sont en effet constituées de kératine, tout comme les cheveux, les ongles ou la corne. Or il existe déjà, on le sait, des lunettes en corne". Bref, porter des lunettes à base de plumes de poulet ce n'est pas encore une réalité, mais ça pourrait bien le devenir.