Penser à l’optique servicielle
Cet été, le constructeur Citroën a proposé une nouvelle aide à la conduite en commercialisant Seetroën, une paire de lunettes destinée aux personnes souffrant du mal des transports ; un phénomène appelé cinétose qui toucherait plus de 60 % des passagers d’un véhicule qu’il soit automobile, bateau, bus ou avion.
Cet été, le constructeur Citroën a proposé une nouvelle aide à la conduite en commercialisant Seetroën, une paire de lunettes destinée aux personnes souffrant du mal des transports ; un phénomène appelé cinétose qui toucherait plus de 60 % des passagers d’un véhicule qu’il soit automobile, bateau, bus ou avion.Ce dispositif lunetier intègre une technologie créée en 2015 par une start-up, Boarding Ring, qui s’est tout simplement penchée sur une problématique humaine et a cherché une réponse. Ceci pour rappeler que le secteur de l’optique-lunetterie s’affaire depuis des lustres à répondre (efficacement !) à nos problèmes de vision, mais sans forcément regarder ailleurs : les nouveaux usages et les nouveaux besoins qui affleurent, soutenus par les mutations technologiques, par des évolutions sociétales et par des nouveaux entrants observateurs d’un monde qui change. Encore faut-il savoir adapter ces révolutions et innover en se mettant au service d’une humanité en quête permanente de solutions pour améliorer son quotidien.
Jusqu’ici, les lunettes connectées n’ont pas rencontré le succès escompté, pour une bonne et simple raison que les entreprises (Intel, Google, Snapchat et consorts) qui s’y sont intéressées n’ont pas pris en compte l’usage à la fois réel et aspirationnel du porteur qui, à l’exception de quelques geeks, ne veulent pas de gadget devant les yeux. Les choses risquent pourtant d’évoluer rapidement, si on compare avec ce qui s’est passé pour les montres intelligentes ou pour le moins disposant de technologies autres que celle donnant l’heure. Il faut remonter à la fin des années 90, pour voir débarquer des montres avec téléphone, GPS, processeurs, puces, mémoire, écran tactile, etc. Mais ces objets souvent assez laids et imposants n’étaient que des extensions du téléphone portable. En 2015, Apple a secoué le marché avec sa première montre connectée, l’Apple Watch, en ajoutant ce que l’entreprise californienne sait faire de mieux : un design d’exception et une interface utilisateur intuitive. Conséquence, Apple domine largement le secteur des montres connectées (33,3 millions vendues en 2017) avec plus de 50 % de parts de marché, loin devant Samsung, le numéro 2 à moins de 11 %. Pour autant, les analystes s’attendent à 80 millions de montres connectées vendues avant 2020. Là encore, Apple devrait tenir le peloton de tête des fabricants : la version 3 de sa montre a explosé les compteurs et plus encore la version 4, avec 24 millions d’unités espérées en 2018 et 33 millions d’unités en 2019, selon UBS. Le succès de l’Apple Smart réside « simplement » dans l’ajout de fonctionnalités qui touchent au « Quantified Self », c’est-à-dire des technologies qui permettent au porteur de gérer sa vie quotidienne, son bien-être, son suivi d’activités, sa santé. Le facteur santé étant le plus recherché par des individus qui veulent mieux la maîtriser et anticiper les dysfonctionnements physiques inévitables. Une Apple Swatch ne sert pas à donner l’heure, mais à accompagner la vie de son porteur…
Le marché des « wearables », les accessoires électroniques connectés à porter sur soi (montres, bracelets, vêtements et… lunettes ! ), devrait passer de 113,2 millions d’unités vendues aujourd’hui à 223,3 millions en 2021, selon IDC. On ne connait pas le poids précis du marché des lunettes connectées, mais il intéresse toujours les géants de la Silicone Valley et des start-up qui s’activent à changer les règles d’un marché. Je continue à penser que le secteur de l’optique-lunetterie est bien souvent dans l’incapacité de comprendre et d’admettre qu’un nouvel entrant puisse venir bouleverser l’ordre établi. Il ne faut pas pourtant se focaliser sur les lunettes connectées. Souvenez-vous de l’arrivée en 2010 de See Concept, rebaptisée depuis Izipizi, une start-up qui a bouleversé le segment juteux mais ennuyeux des lunettes prémontées. La jeune marque s’est rapidement imposée en créant un lien serviciel, accessible et dédramatisant pour les primo-presbytes notamment, avec des lunettes fun et fashion et une distribution atypique hors du marché de l’optique. Les fondateurs de See Concept n’étaient pas du sérail, c’est sans doute pour cette raison qu’ils ont observé clients et usages, avant d’apporter une offre « connectée » au marché. Les fabricants de lunettes, un peu trop autocentrés sur leur savoir-faire, devraient un peu plus souvent regarder ailleurs pour élargir leur horizon. Une paire de lunettes ne sert plus seulement à mieux voir, mais à accompagner la vie de son porteur…
Pour recevoir les dernières infos, inscrivez-vous à notre newsletter