Le Jura cherche ses marques
Si l’économie se réveille, la production manufacturière française n’a toujours pas retrouvé son niveau d’avant la crise de 2007 : la part de l’industrie dans le PIB est aujourd’hui à 12,5% contre 16% en 2000, et malgré quelques soubresauts d’espoir, l’avenir n’est pas réjouissant.
Si l’économie se réveille, la production manufacturière française n’a toujours pas retrouvé son niveau d’avant la crise de 2007 : la part de l’industrie dans le PIB est aujourd’hui à 12,5% contre 16% en 2000, et malgré quelques soubresauts d’espoir, l’avenir n’est pas réjouissant. La balance commerciale continue de se dégrader et l’hémorragie n’est pas prête d’être stoppée avec un système étatique qui garrotte les investissements par des politiques prédatrices, des taxes meurtrières et des réglementations étouffantes, encore et encore, malgré la bonne volonté du gouvernement actuel...
La filière optique-lunetterie est le reflet de cette réalité d’un contexte industriel trop affaibli pour remonter la pente. Le Jura, bassin historique français, pèse encore les deux tiers de l’activité de la lunetterie française, mais pour combien de temps ?
La petite quarantaine de lunetiers et sous-traitants implantés à Morez et ses alentours, ne baissent pas les bras, avec 1 600 emplois à la clé, ils investissent dans leur outil industriel et la formation, sophistiquent leur savoir-faire et promeuvent leurs particularités « locales ».
Dans cette optique, le syndicat professionnel des Lunetiers du Jura a décidé de s’exposer sous un jour constructif en réalisant un clip qui « regarde l’avenir ». Pour Jérôme Colin, Président des Lunetiers du Jura et patron de la société Oxibis, « il s’agit de ne pas montrer une image vue et revue avec lunetiers à l’œuvre dans des ateliers, mais au contraire de mettre en scène ce pour quoi ils maîtrisent un savoir-faire ancestral et légendaire : la création, le design, l’innovation, la modernité… » Ce film vidéo témoigne de cette posture engagée et se veut la première pierre à une campagne de communication plus globale et durable sur les réseaux sociaux baptisée « #Breakuniformity ».
Cet investissement en image, financé par la filière, l’Union européenne, la région Bourgogne Franche Comté et le département du jura, ne suffira évidemment pas à sauvegarder un tissu industriel émaillé de trous, et on peut justement regretter qu’Oyonnax, l’autre vallée industrielle et voisine qui réunit une quinzaine de lunetiers, n’ait pas été associée : dans un contexte de mondialisation n’est-il pas pertinent d’unir les forces en présence ?
D’autant que cette campagne s’adresse au grand public et que « Les Lunetiers du Jura », n’est ni une marque ni un label de qualité, mais un syndicat dont la notoriété est encore à démontrer… Le véritable enjeu pour les lunetiers français n’est pas tant d’investir dans des opérations de communication collective (bien qu’elles ne soient pas inutiles) que de défendre leur position dans un contexte très réglementaire et très concurrentielle. Ils n’ont pas d’autre choix aujourd’hui que de monter en gamme tant d’un point de vue design que de qualité appuyé par un marketing fort. L’optique-luneterie est un secteur de produits et de marques, et l’appréciation d’une paire de lunettes n’est pas tant dans son coût de production ou son lieu de fabrication, que dans sa valeur émotionnelle qui est liée au style et à la marque qui la porte avec son story telling, ses aspérités, l’incarnation d’une signature unique qui la singularise. Chaque marque doit démontrer — seule contre tous — qu’elle « casse l’uniformité »…