Qui a des enfants dans son entourage a constaté leur aptitude intuitive à manipuler un smartphone, un ordinateur ou encore une tablette. Leurs ventes mondiales combinées atteignent des sommets : 2,35 milliards d’unités attendues en 2013, 2,50 milliards en 2014, selon Gartner qui prévoit des progressions de 6% en moyenne par an sur les cinq prochaines années.

Plus que jamais, nous sommes connectés en permanence et passons plusieurs heures par jour les yeux rivés à un écran. Pour la génération Y âgée de 15-25 ans, Digital Natives accomplis, l’étude Pew Internet & American Life Project 2012 constate que le temps passé sur des écrans affleure les 45 heures par semaine en moyenne ! La génération des 6-14 ans n’atteint pas encore une telle consommation parce qu’ils ne sont pas tous équipés, mais demain ? Global Techno Native, cette génération va commencer à lire non pas sur des livres papier mais sur des objets connectés, des écrans interactifs et tactiles. D’autant que l’expérience de lecture sur un livre papier leur paraitra bien « pauvre », trop linéaire, face à des ouvrages digitaux qui invitent à l’immersion totale avec des vidéos, des animations, des hyperliens... Cette (r)évolution est bien sûr un défi pour l’industrie papetière et le secteur de l’édition qui devront, pour la première, réduire fortement ses capacités de production, pour le second, changer son modèle économique. Sans parler d’une obligation pour l’école de repenser ses méthodes d’éducation : un pays comme la Corée du Sud n’a-t-il décidé d’ici 2015 de numériser l’intégralité des manuels scolaires ? Chaque élève disposera d’une tablette et toutes les écoles seront couvertes par le wifi…

Ces Global Techno Natives deviennent aussi un enjeu pour les opticiens parce que les yeux sont et seront de plus en plus happés par ces multiples écrans mobiles. Aucune étude sérieuse n’a démontré un lien de cause à effet entre un écran de visualisation utilisé dans des conditions normales et une quelconque pathologie oculaire, mais il est incontestable que des très longs temps passés rivés à de tels objets électroluminescents provoquent une fatigue visuelle. Et des interrogations se font jour quant à la myopie plus fréquente constatée chez les enfants et les adolescents, progression très sensible qui aurait débuté dans le milieu des années 90. « Les grands foyers de myopie se situent parmi les civilisations qui ont développé l'écriture. Celles-ci sollicitent beaucoup leur vision de près. Et cette vision est de plus en plus sollicitée par les enfants et les jeunes avec les écrans », témoignait le professeur Gilles Renard directeur scientifique de la Société française d'ophtalmologie dans Le Monde du 3 décembre 2012 qui parlait d’une « épidémie mondialisée ».
Des recherches sont menées dans plusieurs pays pour cerner les facteurs qui concourent à cette « épidémie » et à l’incidence d’une surconsommation d’écrans sur les troubles visuelles, en attendant, les opticiens ont un rôle de premier plan à jouer dans la prévention des risques et le suivi des plus jeunes. L’Etat a imposé un médecin référent pour le parcours de soins, pourquoi ne pas imaginer un opticien référent pour la vue ? La baisse régulière du nombre d’ophtalmologistes verrouillés dans leur numérus clausus impose de replacer les opticiens dans leur rôle de professionnel de santé, plutôt que de s’acharner à ne les voir que comme des marchands de lunettes, des passeurs d’ordonnances. La génération ebook est peut-être l’occasion de remettre le débat au cœur de la santé publique, d’autant que les plus jeunes sont encore trop nombreux à ne pas faire contrôler leur vue…

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