La 10e étude annuelle de l’Echangeur BNP Paribas Personal Finance, titrée « Commerce Reloaded », met en perspective la « mutation irrémédiable » liée à la crise sanitaire qui a accéléré la digitalisation de notre société, entre autres choses.

La 10e étude annuelle de l’Echangeur BNP Paribas Personal Finance, titrée « Commerce Reloaded », met en perspective la « mutation irrémédiable » liée à la crise sanitaire qui a accéléré la digitalisation de notre société, entre autres choses. Le e-commerce a fait un bond en avant en seulement quelques mois, gagnant de trois à cinq ans d’avance de pénétration des marchés selon les secteurs. Une situation pérenne qui va se poursuivre, obligeant les acteurs de la distribution à transformer l’aspect des magasins physiques. La stratégie omnicanale n’est évidemment plus une option, de même que l’usage du magasin qui doit être repensé pour se déterminer en lieu d’expériences. « Nous entrons dans l’ère du commerce ambiant », affirme Nicolas Diacono, analyste pour l’Echangeur BNP Paribas Personal Finance. La crise actuelle avec son lot de faillites et les attentes nouvelles de la part des clients poussent à une reconfiguration du commerce en dur. « Ainsi, d’ici 2025, plus de 10 000 nouveaux concepts retail devraient être déployés en Europe et aux Etats-Unis, prédit Nicolas Diacono. Les phénomènes du fast-shopping et les dark stores pourraient se multiplier, les magasins devraient servir davantage de lieux d’expériences, de supports du e-commerce afin de répondre à l’augmentation des commandes en ligne, et devront intégrer une dimension responsable et durable. L’avenir du magasin se trouve dans les échanges sociaux. »

Qu’en est-il du marché de l’optique, plutôt conservateur dans son approche commerciale ? Le commerce optique est figé dans un merchandising et une expérience client gouvernés par un parcours de soin uniforme qui s’est renforcé avec la crise. Les opticiens sont des acteurs de la santé reconnus, ils peuvent s’en féliciter, ce qui ne devrait pas les empêcher de bousculer leurs linéaires trop systématiques. Les enseignes sont plutôt dans une logique d’efficacité avec des points de vente interchangeables sans univers particulier, à quelques exceptions près. Seuls les indépendants, pour beaucoup d’entre eux, sont déjà engagés dans le « commerce ambiant » avec des univers identitaires dans lesquels se retrouvent leurs clients. Des initiatives pertinentes émergent ou ont émergé qui pourraient participer à la « mutation irrémédiable » du commerce optique. Des opticiens indépendants qui entendent se démarquer en s’imposant avec une dimension expérientielle qualitative et un univers commercial différenciant et optimisé pour se dupliquer à de nombreux points de vente. Après avoir rodé le style et l’agencement de ses trois boutiques Optical Factory en région parisienne, Benjamin Tzafa a décidé de déployer son concept « ambiant » sous forme d’enseigne, avec l’ambition d’une quinzaine de magasins à court terme. Lauréat du Prix Janus du Commerce en 2018, Optical Factory revendique « une atmosphère new-yorkaise, urbaine et résolument positive », plus proche d’une boutique de mode que d’un magasin d’optique. Dans un registre plus épuré avec un parcours client dépouillé de toute la surenchère marketing habituelle des enseignes, les magasins Concept Optique à l’initiative de l’entrepreneur opticien indépendant Jean-Marie Couturier, rencontrent des clients en quête de simplicité relationnelle, et pour les opticiens partenaires, de facilité à bien faire leur métier. Avec déjà 21 magasins au compteur et plusieurs ouvertures prévues en 2021, Concept Optique accélère en prenant soin de préserver son âme, l’intégrité de son positionnement. Une préoccupation qui guide aussi l’enseigne premium Edgard Opticiens, co-fondée par Jean-François Porte et Julien Quesnel attachés à l’acte de santé de leur métier et à la dimension plaisir dans l’achat de lunettes dans un environnement marchand chaleureux et haut de gamme. À un rythme calculé, les ouvertures se succèdent et pourraient rapidement préempter le marché convoité de l’optique créative.

Si des indépendants se bougent, des distributeurs, qu’on n’attend pas forcément, aussi. Monoprix, enseigne de proximité inventive, a récemment révélé un concept de corner optique dans ses magasins dans « une approche de la santé positive et facilitante », une signature marketing qui renouvèle un peu les poncifs du secteur focalisé sur les promos à tout-va. Les premières implantations ont provoqué l’ire des ophtalmologistes, toujours bornés par une logique de préservation de leur pré carré ; elles répondent pourtant à une attente des porteurs de lunettes pragmatiques qui recherchent de l’accessibilité, des offres contenues et un service fluide et sans gesticulations commerciales qui les égarent. L’évolution de ce concept est à observer de près, car face à une digitalisation qui finira par s’imposer dans l’optique, débarquer sur un marché aussi concurrentiel exige une stratégie à la fois verrouillée et flexible, des investissements financiers et des ressources humaines. Au cœur des nouveaux concepts émergents, l’opticien doit en effet démontrer son incontestable expertise et son épaisseur relationnelle, pour se rendre incontournable. Demain, les magasins d’optique devront adopter un profil « commerce ambiant » et les opticiens endosser le rôle d’ambianceurs où la dimension plaisir d’achat ne doit pas s’effacer au seul profit de l’acte de santé. Dans son étude, l’Echangeur BNP Paribas Personal Finance a évoqué la tendance du « live shopping » en forte croissance, « un nouveau mode de consommation qui permet aux internautes d’acheter des objets via des vidéos », les opticiens « en live » dans leurs magasins ne doivent pas oublier de se mettre en scène et d’être photogénique...  comme leurs magasins !

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