Après de tortueux échanges pendant deux ans, EssilorLuxottica a pris le contrôle de GrandVision, renforçant l’emprise du géant italo-français sur le monde de l’optique.

Après de tortueux échanges pendant deux ans, EssilorLuxottica a pris le contrôle de GrandVision, renforçant l’emprise du géant italo-français sur le monde de l’optique. Incité par la Commission européenne à mettre de l’eau dans son spritz en cédant des centaines de boutiques dans divers pays sur les 7 400 qu’il récupère, le leader mondial va renforcer sa domination avec plus de 15 % du chiffre d’affaires global du secteur évalué à environ 125 milliards d’euros en 2020. Pourtant, demeurer numéro 1 partout (verres, montures, e-commerce, magasins…) ne va pas être une sinécure pour continuer à croître, pour innover, pour s’adapter à des marchés mouvants, pour arracher de la marge avec les dents, d’autant que la prise en main par la partie italienne de l’ensemble du groupe impose un management descendant (« très directif » entend-on en interne) peu ouvert aux initiatives des talents et des filiales multiples.

Puissant mais alourdi, un tel colosse ne doit pourtant pas effrayer la concurrence, au contraire, elle doit stimuler l’ensemble des acteurs à réagir. Dans les cinq années à venir, on va assister à une recomposition en mode accéléré du secteur avec des producteurs de lunettes davantage sélectifs dans leur développement produits plus en adéquation avec les tendances consommateurs ; avec des verriers renforçant leur R&D pour mettre au point des équipements « haute mesure » (clin d’œil à la haute couture !) qui répondent au mode de vie, à la diversité et à l’exigence des porteurs ; avec des distributeurs, enseignes et indépendants, invités à raffermir leur identité marchande, à diversifier leurs offres de services pour améliorer l’expérience d’achat et renforcer des relations commerciales de proximité continues et sincères. Et bien sûr, en adoptant un profil omnicanal. La tendance générale de faire contrôler sa vue par un ophtalmologiste ou par un optométriste, puis d’aller acheter son équipement visuel chez un opticien, va rester dominante, ce qui n’empêche pas d’observer les marges de progression du marché de l’optique en ligne. L’essayage virtuel et la téléconsultation ophtalmologique, au réalisme et à l’efficacité indiscutables, vont rapidement devenir encore plus efficaces et accessibles grâce à l’intelligence artificielle et à la volonté d’acteurs qui ne seront pas forcément des pure players, mais des spécialistes du brick and mortar. Dont le groupe EssilorLuxottica qui devrait faire bouger les lignes pour assurer une synergie entre les réseaux de magasins et les sites marchands de son périmètre.

Accélérateur indéniable, la pandémie a mis en perspective la nécessaire hybridation du commerce physique et digital. Un vrai tournant à prendre pour les opticiens qui doivent gérer des clients qui plébiscitent cette hybridation à géométrie variable et l’exigence d’une proximité relationnelle. À la rentrée, je prévois de présenter une étude prospective sur le retail optique pour apporter ma pierre à l’édifice de cette recomposition stimulante qui se dessine à l’horizon des prochaines années.  

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