Les ophtalmologistes réagissent vigoureusement à un amendement qui préconise la vente des lentilles sans ordonnance. Et égratignent au passage les opticiens.

"Une hérésie médicale". C'est en ces termes vifs que le Syndicat National des Ophtalmologistes de France (Snof) a commenté l'amendement déposé à l'article 6 de la loi qui entend renforcer les droits, la protection et l'information des consommateurs, et dont nous vous avons parlé précédemment. Cet amendement recommande de supprimer l'obligation faite aux opticiens de demander une ordonnance pour la délivrance des lentilles de contact. Pour les ophtalmologistes, il n'est pas question d'envisager une telle situation : « L’ordonnance de l’ophtalmologiste est une garantie de conformité des lentilles aux besoins et aux spécificités des yeux du patient en matière de correction oculaire, mais aussi du point de vue anatomique. L’obligation d’une ordonnance médicale est également le moyen de faire vérifier l'intégrité de la surface de la cornée et de dépister éventuellement une pathologie induite par le port de lentille".

Surtout, le Snof refuse que la seule responsabilité du choix des lentilles revienne à l'opticien : « L’absence d’ordonnance sous-entendrait en réalité que le choix de la marque des lentilles est laissé à la discrétion de l’opticien, sur des considérations essentiellement commerciales. Sachant qu’il n’existe pas deux marques de lentilles de contact au comportement identique, c'est, à coup sûr, une mesure qui accroîtra les intolérances mineures, cause d'abandon du port des lentilles. Il n'est pas sûr que les fabricants y trouvent leur compte, mais il est certain que plus de complications majeures pèseront sur le budget de l'assurance maladie et auront un coût humain et social non négligeable en termes de handicap pour les "consommateurs". En clair, le syndicat voit dans cet amendement et ses éventuelles conséquences une "démédicalisation" des lentilles. C'est aussi la position de la Société française des ophtalmologistes adaptateurs de lentilles de contact qui monte en première ligne dans cette affaire. Inquiétude, surprise, mise en garde, c'est en ces termes que celui-ci a accueilli l'examen de cet amendement. Ils redoutent "le manque de surveillance médicale" qu'entraînerait cet amendement s'il était finalement acté. Bref, tous veulent que la délivrance des lentilles soit purement et simplement conditionnée à la présentation d'une ordonnance.