Nouveau visage de la Fédération nationale des opticiens de France (FNOF), Hugues Verdier-Davioud nous a accordé un premier entretien. L’occasion de faire davantage connaissance avec cet architecte de formation initiale venu à l’optique par passion pour « un métier fondamentalement de santé ». Et qui entend bien défendre, promouvoir et valoriser cette dimension auprès des décideurs publics et des autres acteurs de la filière.

Le bâton de pèlerin a changé de main. Après avoir consacré vingt-deux ans de sa vie au syndicalisme, Alain Gerbel a passé le relais, prenant une retraite bien méritée. Hugues Verdier-Davioud (photo) préside donc désormais aux destinées de la « Fédé », et nous avons pu échanger avec lui la semaine dernière, au lendemain de son élection lors du congrès annuel de la FNOF à Biarritz. Âgé de 49 ans, il est issu d’une famille de médecins (ses parents sont dentistes) et sera d’abord tenté lui aussi de faire médecine avant de s’orienter finalement vers... l’architecture. Ce n’est que plus tard que cet architecte DPLG s’est pris de passion pour l’optique, « un métier fondamentalement de santé, c’est sa noblesse », qu’il exerce au côté de son épouse en région parisienne. Après avoir mené de front les deux activités - l’archi et l’optique -, il va pleinement s’investir dans cette seconde carrière au point de s’engager syndicalement dans les rangs de la FNOF. À partir de 2017, évoluant auprès d’Alain Gerbel qui voit dès lors en lui un possible successeur, il se familiarise avec les dossiers. Cinq ans dans l’ombre d’ « Alain », dit-il, à découvrir les rouages institutionnels, à se glisser dans le costume syndical, à prendre ses marques. Et de toute évidence, le rôle est taillé pour lui tant il se montre sûr aujourd'hui dans son propos. Il était la doublure d’Alain Gerbel jusque-là, le voilà dorénavant dans le premier rôle. Nouvelle figure de l’organisation professionnelle, Hugues Verdier-Davioud aura-t-il le même style que son prédécesseur, qui ne mâchait pas ses mots quand la situation l’exigeait ? « On m’attribue un certain tempérament », répond, tout en euphémisme, le nouvel impétrant, avant d’ajouter aussitôt : « Quand j’ai quelque chose à dire, je le dis ».

Questionné sur les dossiers prioritaires et les chantiers en cours du syndicat, Hugues Verdier-Davioud répond suivant la logique du changement dans la continuité. Très sensible à la problématique des données de santé - « qui a été un déclencheur de mon engagement syndical » -, il en fera un cheval de bataille, comme son prédécesseur. Mais ce n’est pas tant sur ce sujet-là qu’il s’attarde avec nous, que sur celui de l’attractivité du métier : « Donner envie aux jeunes de rester dans la profession, d’y évoluer, de s’y épanouir, c’est un vrai sujet. Un sujet sur lequel notre syndicat doit être moteur », déclare le nouveau président qui constate que beaucoup de jeunes recrues se posent déjà des questions à peine arrivées sur le terrain : « Certains, à peine en poste, songent déjà à se reconvertir, découragés par l’aspect très rebutant de l’administratif. Sans parler, avant cela, des étudiants qui décrochent au cours de leurs études parce que l’aspect vente est survalorisé au détriment de la dimension santé. » Le porte-voix de la FNOF évoque aussi la notion de bien-être professionnel qui évolue avec les attentes des nouvelles générations, suite notamment à la crise sanitaire porteuse de questions sur le sens de la relation au travail. Le syndicaliste pense aussi particulièrement, sur un autre plan, à la situation des femmes : « La profession se féminise, mais les femmes effectuent encore trop souvent, moins par choix que par contrainte, des temps partiels. D’où leur carrière hachée. Il faut réfléchir à cette situation aussi. »

Si la réingénierie du diplôme, la traçabilité et, on l’a dit plus haut, la sécurisation des flux de données figurent sur la feuille de route d’Hugues Verdier-Davioud, la valorisation des prestations de l’opticien reste, comme pour Alain Gerbel avant lui, l’une de ses grandes préoccupations. « D’un point de vue économique et comptable, la situation de l’opticien se tend toujours plus. Entre la montée en charge du 100 % Santé et le marché dit libre, en réalité comprimé par les Ocam, l’opticien est sans cesse plus sous pression. Seule la pleine et entière reconnaissance de ses prestations de santé, qui doivent être facturées, peut lui redonner des marges de manoeuvre tout en l’inscrivant définitivement dans le champ de la santé publique. Car tel est encore et toujours l’enjeu d’avenir : Alain Gerbel a porté et ancré la notion d’opticien de santé, à moi désormais de la développer plus ardemment ». Et M. Verdier-Davioud de l’assurer : « Pour la profession, l’opticien de santé est la seule alternative durable. Ce n’est certainement pas le tout-commerce, une logique qui sacrifie la qualité des services, qui nous sauvera. Et encore moins la téléconsultation : telle qu’elle nous est présentée en ce moment, c’est un mirage », argumente-t-il, avec de la conviction dans la voix. Pour un peu, on croirait entendre Alain Gerbel. La FNOF a changé de capitaine mais pas de cap...

 

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