Après le Rassemblement des opticiens de France (ROF), c’est au tour de la Fédération nationale des opticiens de France (FNOF) de présenter sa contribution pour un reste-à-charge zéro en optique et, au-delà, une réorganisation plus efficiente de la filière visuelle.

Proposer aux Français un équipement de qualité sans reste-à-charge ? C’est « un défi » que la FNOF se dit prête à relever. Comment, c’est ce que la Fédération détaille dans un document qui vaut synthèse et que le syndicat présente aujourd’hui. L’approche retenue par Alain Gerbel, le président de l’organisation, est à la fois systémique et technique. Dit autrement, le syndicat n’entend pas isoler la question du reste-à-charge mais au contraire veut l’inscrire dans un ensemble d’éléments en relations mutuelles : parcours de soins coordonnés, convention Cnam, panier de soins, tiers-payant, etc. Reprenons point par point.

L'opticien comme "gatekeeper"

D’abord, le parcours de soins. Pour la FNOF, il ne fait aucun doute que l’opticien ne donne pas sa pleine mesure. La réforme de la filière visuelle souhaitée par le gouvernement constitue pour le syndicat une opportunité pour réinterroger aujourd’hui la place et le rôle de l’opticien dans le cadre d’une politique de prévention globale. Dans un contexte où se pose de façon aiguë la question de la pénurie d’ophtalmologistes et des déserts médicaux, « les compétences de l’opticien de santé doivent être pleinement utilisées », fait valoir le syndicat. Et d’expliquer : « L’harmonieuse répartition des opticiens sur l’ensemble du territoire et la facilité d’accès à ces derniers doit conforter l’opticien dans son rôle de  ‘gatekeeper’ ». Gatekeeper ? Le terme signifie littéralement portier. Appliqué au cas présent, il permet surtout de mettre en avant ce que l’on pourrait appeler la fonction de régulateur de l’opticien au sein de la filière visuelle. En clair, ce serait lui qui, demain, serait amener à favoriser et fluidifier l’accès aux soins. Concrètement, selon la FNOF, « ce parcours coordonné doit se mettre en place autour de plots de santé consistant en des visites obligatoires chez l’ophtalmologiste à des périodes précises de la vie (à 5 ans, 17 ans, 42 ans, 60 ans par exemple). Ce système doit permettre de coordonner les actions des différents acteurs, ophtalmologistes, orthoptistes, opticiens et de manière plus large avec d’autres professionnels de santé, afin de doter la France du premier système de prévention en santé visuelle au monde ». Si la place de l’opticien venait à être confirmée comme « gatekeeper », « ses prestations devront être définies dans le cadre de règles professionnelles complétant les textes existants. Ce sera ici l’occasion de reconnaître une prestation de suivi consistant à prendre en charge l’amétrope entre deux changements d’équipement, prestation rémunérée et prise en charge par les différents organismes », argumente la FNOF qui, ainsi, conditionne de fait une politique de prévention à l’élaboration et au financement de prestations clairement codifiées. Cela pose évidemment la question de la prise en charge par les complémentaires de ces futures « prestations nomenclaturées ». Dans cette perspective globale du renforcement du rôle-pivot de « l’opticien de santé », il va sans dire pour la FNOF que la formation est capitale. Fidèle à sa position sur ce sujet depuis des années, le syndicat souhaite voir évoluer la formation initiale des opticiens vers l’universitarisation et se généraliser la formation continue au travers du DPC.

Vers "des relations vertueuses entre les organismes complémentaires et les opticiens"

Ensuite, la convention CNAM. Pour ce qui est de l’accès à l’équipement, le syndicat demande à ce qu’elle devienne la convention unique régissant les relations entre l’assurance maladie, les organismes complémentaires et les professionnels de santé. « En dehors de cette convention, il ne pourra y avoir d’autre convention de tiers-payant ou accord commercial visant à introduire notamment une modulation des remboursements en fonction des professionnels de santé ». Derrière la neutralité apparente de la formulation de cette demande, c’est évidemment une pierre lancée dans le jardin des réseaux de soins pratiquant les remboursements différenciés… L’organisation syndicale veut croire que « le principe de la convention unique permettra de mettre en place des relations vertueuses entre les organismes complémentaires et les opticiens ». Et la Fédération de souhaiter à cette fin que des négociations tripartites (UNCAM, UNOCAM et opticiens) puissent débuter au plus vite afin de définir un panier de soins reste à charge zéro, son financement et la pratique du tiers-payant. Justement, venons-en maintenant au panier de soins nécessaire. Avant d’en définir le contenu proprement dit, la FNOF veut en priorité établir le périmètre de ceux à qui il s’adresserait : « il nous faut connaître la population disposant de faibles couvertures assurantielles (CMU, ACS, contrats responsables au ticket modérateur ou aux planchers).
 Il s’agit de définir, dans le cadre de la convention CNAM, un panier de soins nécessaire (équipement et prestations), c’est-à-dire répondant au besoin de bien voir, uniforme pour toute la population y compris pour les bénéficiaires de la CMU et de l’ACS ; ce panier sera sans reste à charge. L’assuré restera libre d’accepter cette proposition ou non. Le financement doit être partagé entre les différents acteurs ». D’autre part, ajoute la FNOF, « une revalorisation des différents planchers existants doit être mise en place afin de permettre une harmonisation de la mesure et un libre accès de tous les Français à un équipement de qualité ».

Le tiers-payant, "un droit pour l'assuré"

Autre volet, plus technique celui-là : la gestion du tiers-payant. « L’assuré doit pouvoir faire valoir son droit au tiers-payant sans contrepartie notamment pour la CMU, l’ACS et les contrats responsables et solidaires. La transmission des données vers les différents régimes doit se faire en toute sécurité et transparence via les systèmes SESAM Vitale 1.40 et SCOR. Dans le cadre des demandes de cotation et de prise en charge, l’opticien devra utiliser les services de l’association INTER-AMC. Pour ce faire un cahier des charges devra être négocié dans le cadre de la convention tripartite et mis en place avant le 1er janvier 2019. L’opticien reste libre d’accorder le tiers-payant ou pas », fait valoir la FNOF. « De plus le développement des échanges sous le protocole 1.40 apportera aux patients une garantie de remboursement dans un délai de 5 jours et à l’opticien une garantie de paiement qui fait aujourd’hui cruellement défaut », précise encore le syndicat. Bref, ce sont là autant de propositions que la FNOF estime être frappées du sceau de la liberté : « liberté de choix de son professionnel de santé, liberté de choix de son équipement, liberté de choix de son reste à charge ».


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