Ce qu’il faut retenir de la soirée d’échanges qui a eu lieu mardi, à l’initiative du fondateur de Point Vision et en partenariat avec Essilor et Johnson & Johnson.

Selon les organisateurs, près de 1 000 auditeurs ont suivi, mardi soir, la webconférence intitulée "Filière visuelle, le grand débat", impulsée par François Pelen, le fondateur de Point Vision, en collaboration avec Essilor et Johnson & Johnson. Deux tables-rondes étaient au programme, la première avec le trio organisateur et l’économiste Nicolas Bouzou, la seconde avec des représentants syndicaux des 3 "O". De la première partie on retiendra surtout quelques chiffres. Citant un récent sondage réalisé par l’IFOP, Nicolas Bouzou a indiqué que 43 % des Français renouvellent leurs lunettes tous les ans et que le prix moyen d’un équipement (tous types de corrections confondus) s’établit à 403 euros. Directrice générale d’Essilor France, Prûne Marre, de son côté, a rappelé que l’Hexagone compte le plus fort taux au monde - avec 70 % - de presbytes équipés en progressifs. Évoquant le développement galopant de la myopie, elle a aussi précisé qu’en 2050 il pourrait y avoir 10 % de la population concernée par de fortes myopies (c’est-à-dire à partir de -6). Si elles ne sont pas correctement prises en charge, à commencer chez les enfants, des risques de cécité sont à craindre, les myopies sévères pouvant dégénérer, on le sait, en pathologies oculaires graves. Prûne Marre a par ailleurs tenu à souligner un autre fait d’importance : 1 porteur sur 5 actuellement n’aurait pas une correction adaptée à ses besoins, faute, probablement, d’avoir accès à un prescripteur. Abordant son coeur de métier, la contactologie, Mathilde Beau, qui chapeaute rappelons-le la direction des marchés de l’Europe de l’Ouest au sein du laboratoire Johnson & Johnson, a pour sa part fait le constat que la France enregistre un taux relativement faible de porteurs de lentilles : avec 8 %, l’Hexagone se situe en-dessous de la moyenne européenne, qui s’établit à 11 %. En Europe du Nord, on atteint même des taux de l’ordre de 20 %. C’est dire si le potentiel de développement de ce segment de marché en France a encore de grosses marges de progression…

La seconde séquence de la soirée a vu débattre quatre présidents de syndicats : le Syndicat national des ophtalmologistes de France (SNOF), le Syndicat national autonome des orthoptistes (SNAO), le Rassemblement des opticiens de France (ROF) ainsi que la Fédération nationale des opticiens de France (FNOF). D’abord interrogés sur la question de l’accès aux soins, les participants ont affiché sans surprise des vues quelque peu divergentes. Si le Dr Thierry Bour, à la tête du SNOF, estime que les délais d’attente pour décrocher une consultation reculent de façon continue depuis huit ans, les porte-voix des organisations syndicales d’opticiens, Stéphane Corfias (ROF) d’un côté et Hugues Verdier-Davioud (FNOF) de l’autre, sont autrement plus circonspects. Ils ne nient pas qu’il y ait des améliorations, mais encore trop de territoires, selon eux, constituent des zones sous-dotées en prescripteurs, voire des déserts médicaux. Se projetant à moyen terme, le président du ROF estime même qu’il faudra au moins une décennie pour que la situation de l’accès aux soins se normalise vraiment et soit enfin optimale. Représentante du SNAO, Mélanie Ordines se dit quant à elle confiante dans la montée en puissance de la mesure, tout récemment entrée en vigueur, qui accorde aux orthoptistes le droit de primo-prescription. Cette nouvelle disposition règlementaire devrait significativement fluidifier l’accès à un équipement visuel, veut-elle croire. Les instances syndicales optiques en appellent, elles, à plus de responsabilités pour la profession. Pour Stéphane Corfias, « l’opticien n’aura jamais vocation à se substituer à l’ophtalmo, mais il peut jouer son rôle en première intention. On est là pour rendre service. On ne veut pas devenir primo-prescripteurs, mais on souhaite davantage de coopérations avec les autres professionnels », a déclaré l’intéressé. Point de vue assez proche pour Hugues Verdier-Davioud qui considère que « l’opticien peut être la porte d’entrée dans le parcours de soin, le premier recours ». Et le président de la FNOF d’assurer que « la profession a un vrai rôle à jouer en matière de réfraction, de vision de l’enfant ou encore de basse vision », a-t-il cité comme exemples caractéristiques des orientations à suivre pour l’affirmation de l’opticien de santé.

Il a aussi été question de la téléconsultation, sujet qui revient de plus en plus souvent sur la table en ce moment. En l’état actuel des choses, elle ne semble pas faire l’unanimité, loin s'en faut. En première ligne sur ce thème, le Dr Bour (SNOF) espère une régulation législative prochaine car il considère que le développement de la téléconsultation, depuis la crise sanitaire, pose « des questions de conflits d’intérêts » potentiels. Mélanie Ordines (SNAO) également réclame un strict encadrement de cette pratique : « Ça va trop vite, le principe de santé n’est pas assez appliqué. Il ne faut pas confondre accès aux soins et qualité des soins », a-t-elle dit. Hugues Verdier-Davioud (FNOF) constate « un manque complet d’encadrement » en la matière, allant jusqu’à parler d’un développement « anarchique ». Du point de vue de Stéphane Corfias, pour qui « l’idéal reste une consultation physique », téléconsultation et accès aux soins sont deux problématiques corrélées : « Si on règle la question de l’accès aux soins, le marché de la téléconsultation va s’assécher. »

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